"Le numérique change profondément l’industrie de la beauté"

Pour répondre à l’avènement de l’esthétique sur mesure et l’attention croissante portée à l’origine des produits, L’Oréal s’engage aujourd’hui pour réinventer la beauté du futur grâce aux nouvelles technologies. Explications avec Barbara Lavernos, directrice générale adjointe, à la tête du programme Beauty Tech, et Asmita Dubey, directrice générale en charge du Digital et du Marketing.

5 minutes de lecture

Quelles sont, selon vous, les grandes tendances qui redéfinissent le secteur de la beauté ?

Barbara Lavernos : Si nous avons observé une nette accélération dernièrement, les consommateurs souhaitent toujours plus de personnalisation depuis une vingtaine d’années. Aujourd’hui, en tant que leader de la Beauty Tech, nous sommes parvenus à des niveaux de précision jamais atteints, pour lesquels nous pouvons parler d’hyperpersonnalisation, en fonction de la nature de sa peau, de ses cheveux ou de ses rituels de beauté. À travers des « expériences beauté » et grâce aux sciences associées à la technologie, nous créons, avec et pour notre clientèle, une beauté plus inclusive, transparente et responsable. Nos utilisateurs peuvent ainsi obtenir, par exemple, un diagnostic dermatologique via la caméra de leur smartphone, essayer une nouvelle coloration virtuellement, avoir un conseil beauté sur mesure et pouvoir mesurer le résultat avant de choisir un produit.

Asmita Dubey : Les consommateurs sont en quête de confiance et d’authenticité, d’autant que les influenceurs s’imposent désormais comme la voix des marques. Ils veulent des produits de qualité, basés sur la science, avec des composants de premier choix, mais qui prennent aussi en compte le rapport qualité-prix. La technologie nous permet d’être dans cet échange permanent et circulaire entre marques et consommateurs.

Quelle a été l’influence de la crise sanitaire sur leur comportement ?

BL : La crise sanitaire a agi comme un catalyseur sur le consommateur. Elle a renforcé ses attentes vis-à-vis des grandes entreprises, mais aussi sa vigilance sur l’impact et les engagements sociaux et environnementaux des produits ( traçabilité, composition, etc.).

AD : Elle a aussi agi comme catalyseur en matière d’accessibilité, de facilité dans leur parcours client et d’exploration de nouvelles frontières entre physique, numérique et virtuel. Le consommateur attend que nous lui proposions des options adaptées à son profil. Aujourd’hui, toutes nos marques intègrent désormais une grande fluidité entre choix en ligne et hors ligne dans leur parcours client.

"La technologie nous permet d’être dans un échange permanent et circulaire entre marques et consommateurs."

Asmita Dubey

Comment vous positionnez-vous dans un tel contexte ?

AD : Avec des technologies comme la réalité augmentée, la réalité virtuelle, l’intelligence artificielle ou la connectivité 5G, nous réinventons continuellement les expériences beauté, mais aussi les interactions avec les consommateurs. De fait, nous dessinons les contours de notre « avantage numérique » pour un monde en plein mouvement. Nous voulons par exemple passer de la digitalisation à la virtualisation, de la transformation numérique à la transformation des données, ou encore d’un modèle mêlant physique et numérique à un autre incorporant les possibilités offertes par le Web3 (la prochaine génération d’Internet exploitant la technologie des blockchains qui permet de stocker et transmettre des informations de manière transparente, sécurisée et sans organe central de contrôle, alors que le Web 2.0 est considéré comme l’Internet « social », ndlr).

BL : Nous travaillons en effet sur ce croisement entre beauté, recherche et innovation technologique depuis plus de dix ans maintenant, ce que l’on appelle la « Beauty Tech » et qui permet de créer la beauté augmentée et sur mesure, qui s’adapte à vos besoins et à votre créativité. Nous voulons ainsi être à l’avant-garde et nous servir de la science pour façonner la beauté de demain. Nous croyons fermement que la technologie peut nous aider à concevoir un futur qui permet plus d’inclusivité pour tous les peuples du monde, mais aussi à pérenniser un portefeuille unique de marques, produits et services toujours plus responsables et transparents. La technologie ouvre par ailleurs de nouvelles perspectives en matière de responsabilité environnementale : elle permet de réduire considérablement l’impact écologique de nos produits et services à différents stades de leur cycle de vie, tant pour les consommateurs que pour les professionnels. Cette transformation technologique est au service de nos utilisateurs, mais aussi de nos équipes et collaborateurs pour les aider à atteindre nos objectifs qui visent à créer la beauté qui fait avancer le monde.

Qu’est-ce que votre partenariat avec Google vous apporte dans l’application de cette stratégie ?

AD : Google est un partenaire majeur de notre transformation numérique. Ensemble, nous avons notamment étendu nos actions à la vidéo et au mobile. Alors que les recherches en ligne concernant la beauté se comptent en milliards et continuent d’augmenter, nous faisons en sorte de répondre aux besoins des consommateurs au bon moment en leur fournissant un contenu adapté. Notre partenariat a aussi permis de développer l’utilisation de la réalité augmentée appliquée aux cosmétiques, que ce soit dans le moteur de recherche ou sur YouTube. Par exemple, ModiFace permet de visualiser les effets de nos produits en temps réel : les utilisateurs peuvent ainsi essayer virtuellement différentes nuances de rouge à lèvres, de couleur de cheveux et d’autres produits dans une vidéo réalisée en direct ou sur un selfie. Et nous venons de démarrer un partenariat d’un nouveau genre avec Verily (filiale d’Alphabet - maison mère de Google - spécialisée dans la recherche sur les sciences de la vie, ndlr) pour innover dans le domaine de la dermatologie.

BL : Nous investissons depuis plusieurs dizaines d’années pour approfondir nos connaissances de la peau humaine : les maladies de peau, l’impact des UV ou encore le processus de vieillissement. Et notre collaboration avec Verily est un excellent exemple de la façon dont une compagnie centenaire peut s’associer à une jeune entreprise créative pour doper l’innovation. Grâce à ses capacités en recherche clinique, nous serons bientôt en mesure d’établir une vue à 360° totalement inédite de la santé de la peau et de décoder pour la première fois sa biologie profonde. Nous pourrons proposer des soins, basés sur le taux d’exposition de chacun à des facteurs environnementaux, comme la pollution ou l’exposition aux hormones. Sans aucun doute, cela va entraîner des découvertes pour la science, débloquer de nouvelles perspectives pour permettre de passer des soins réactifs aux soins proactifs, voire préventifs.

"Nous travaillons sur ce croisement entre beauté, recherche et innovation technologique depuis plus de dix ans maintenant, ce que l’on appelle la "Beauty Tech"".

Barbara Lavernos

Quelles sont les prochaines étapes de développement chez L’Oréal ?

AD : En tant que leader de la Beauty Tech, nous allons façonner l’avenir de la beauté numérique en concevant de manière responsable la meilleure expérience client possible. Les opportunités pour nous sont nombreuses : l’accélération de l’e-commerce, le développement des expériences de beauté augmentée grâce aux possibilités de l’intelligence artificielle, la cocréation au sein d’une communauté de créateurs qui débordent d’énergie, l’apparition des avatars en 3D, la multiplication des interactions entre consommateurs et prescripteurs.

BL : L’avenir de notre stratégie dépend de notre capacité à saisir les opportunités d’intégrer ces technologies révolutionnaires dans toutes les composantes de notre groupe. Développer la Beauty Tech chez L’Oréal, c’est inventer la beauté de demain. C’est un voyage captivant !

Histoires associées